mercredi 30 mars 2016

SCC10/18 - UN PEUPLE A T IL SA PLACE DANS UNE SORCELLERIE ?


Mulunge
J'attends que le jour décline et je ne me déplace plus... On me dit que même les ananas peuvent être victimes d'insolation !, qu'une fois la nuit tombée pour me protéger de la chaleur et mettre mon ombre à l'abri des prédateurs.

Résumons-nous, répétons-nous : une Haute Hiérarchie et ses âmes damnées (et les sorciers régaliens, feudataires, légataires, proconsulaires, territoriaux ou ligablistes), épaulés par les « services » d'Ysengrin,  les crapuleux  (tels que le général***,  prélat inquisiteur du Saint-Office) et leurs équipes d'hommes de main ou instrumentistes chargés de faire disparaître les personnes qui dérangent... ainsi se présente la réalité du pouvoir dans une sorcellerie. 

Et tout le reste ne compte pour rien.

La masse

Le reste ?
Le peuple, la « masse » des babola, des sans grade et des sans dents, des rustauds et des "gemeinen Mannes"... ces "chiens fous" que Martin Luther, à l’époque de la guerre de paysans allemands, proposait d'étrangler et de saigner !
Le "peuple" ou la "populace"... qu'ont également dédaigné, à leur époque, les philosophes-conseils Voltaire… Cot Cot Codeeet !  et Diderot… Diling-Diling ! Voltaire déclarant, notamment : "J'entends par peuple la populace qui n'a a que ses bras pour vivre. Quand la populace se mêle de raisonner, tout est perdu"
Le "peuple" des opprimés comprenant des travailleurs et des chômeurs, des salariés et des indépendants, des agriculteurs et des creuseurs, des portefaix et des pousse-pousseurs, des ouvriers et des artisans, des taximen et des wewa, des vendeuses et des tenancières de malewa, des étudiants et des professeurs, des employés et des fonctionnaires et dans lequel se retrouvent "des catégories extrêmement diverses du point de vue des situations, des revenus et des modes de vie, donc des classes sociales différentes" (cf Patrice Cohen-Seat "Peuple! Les luttes de classe au XIXe siècle",Demopolis, 2016)...

Ce sont particulièrement :

La masse des habitants de la campagne, ces « paysans soûlards,  ignares et abrutis, taillables et corvéables à merci certes... mais  (s'indignent les sorciers) de plus en plus résistants et rebelles, voleurs de régimes de noix de palme dans les plantations et pratiquant illégalement l'agriculture, l’élevage, la pêche, la chasse ou la cueillette et fabriquant du lotoko et du charbon de bois sur les terres domaniales... Et se permettant même d’y enterrer leurs morts !,  et dans les forêts seigneuriales »
- Ohoooh ! Pour les paysans qui n'ont ni la télévision ni Internet et qui n'arrêtent pas de procréer, on fait quoi, Nat ? On les castre et on les ligature ? On demande aux RP missionnaires de prêcher la méthode Ogino ?
- Etali biso te, fieu ! Ce sont des rustres sans moralité qui ont plus de considération pour leurs vaches, leurs chèvres, leurs poules ou leurs cochons que pour leurs femmes ! Diderot, philosophe des Lumières et conseiller des Grands de ce monde, le disait déjà dans le temps et rien n'a vraiment changé depuis ! Qu'on les laisse donc patauger dans leur poto-poto infâme, les épidémies auront rapidement raison de leur prolificité irresponsable !
- Ohoooh ! Nzambe akosala ?
- Onyati, fieu !

Ce sont aussi : 
La masse des sous-prolétaires qui triment et s'abiment la santé dans les carrières et les mines, ces « forçats-creuseurs, endurants et pugnaces, maigres et baraqués, durs à la tâche et à la douleur certes... mais (soupirent les sorciers) souvent chanvrés, exigeants, quelquefois paillards et généralement bagarreurs »
- Ohoooh ! Pour les orpailleurs, mineurs et autres "hommes forts" (y compris les pomba de  N'djili ou De Bonhomme et les catcheurs de Matete), on fait quoi, Nat ? On valorise leur potentiel ? On affrète des navires négriers comme le fit jadis Voltaire? On embauche des coupeurs de canne à sucre pour les plantations de Saint-Domingue ou de la Martinique ? Ou pour la construction des Pyramides ou les chantiers gigantesques du Dubaï ? On recrute des joueurs de football "moins chers", des videurs de boîtes de nuit, des gardes du corps ou des agents de sécurité ? On fait quoi ?
- Etali biso te, fieu ! 
- Ohoooh ! Nzambe akosala ?
- Onyati !

Ce sont enfin:

La masse des habitants des villes, des centres et des cités, cette « populace de sans emploi et de petits employés sans ambitions, d’élèves et d’étudiants improductifs, de chargeurs et de déchargeurs hébétés, d'ouvriers et d'artisans adroits, de combinards et de commissionnaires astucieux », cette masse urbaine « débrouillarde et ingénieuse certes... mais (s'inquiètent les sorciers) ambianceuse, frondeuse, arnaqueuse, imprévisible et bientôt menaçante»
- Ohoooh ! Pour tous ces gens qui ont fui la chicote et les travaux forcés, les pillages et les privations, les viols et les exécutions sommaires, la sécheresse ou les inndations et qui se sont réfugiés dans les bourgs et dans les zones annexes, vous avez un plan, Nat ? Comme jadis de professeur Van Bilsen ? 
- Ce qu'il faut, disait Voltaire, c'est les empêcher de "raisonner", sinon "tout est perdu", fieu !
- Ohoooh ! On fait quoi alors ? On les transforme en "frères et soeurs en Christ", en fans de Werrason et de FerGola ou en supporters de l'AS V. Club
- Boye !
- On leur offre des stades et des lieux de prière, des concerts de musique gratuits, une chasse aux kuluna, des matchs de foot et de catch  ?
- Boye !
- Ohoooh ! Mais après la prière, la musique, le supplice du collier et les matchs... quand ils demanderont à étudier, à  travailler, à se soigner, à se loger, à avoir de l'eau et de l'électricité, à manger, on fait quoi ? On les renvoie à  Bukango-Lonzo ou à la mine de Lupoto ? On attend trente ans ? On fait quoi, Nat ?
- Etali biso te ! 
- Ohoooh ! Nzambe akosala ?
- Boye !
- Mais s'ils se révoltent, Nat ? Et s'ils menacent de se soulever ? 
- On les intimide, on les fait taire et on les immobilise ! 
- Et s'ils résistent ? Et si certains d'entre eux essayent de piller les magasins des Chinois et des Libanais, Nat ?
- On les réprime, on les arrête et on les pulvérise ! On les enterre dans des oubliettes ou dans un charnier à Maluku !

La question qui se pose est alors la suivante:
Y a-t-il place pour un peuple dans une sorcellerie, aujourd'hui comme hier ?

Y a-t-il place pour les gens de partout et de tous les jours ? 

Y a-t-il une place, dans une sorcellerie, pour  les couturiers, les coiffeurs (spécialistes du zigzag sur le crâne) et les tresseuses, les vendeurs-placeurs de faux-cils et les Bana Vernis, les cordonniers, les femmes maraîchères exerçant leurs activités potagères dans le cimetière de Kimbanseke (dont elles partagent le territoire avec un groupe de kuluna), les agriculteurs, les commerçantes du Marché Central, du Marché de la Liberté, du Marché Somba Zigida et de l’espace Type K  (dans le bourg autonome d'Expo; alias Mboki), du Marché UPN ou du Marché Gambela, les vendeuses des Marchés Synkin et Moulaert (dans le bourg de Bandalungwa), du Marché Baudouin (dans la Cité des Anciens Combattants, à Binza Ozone) ou du Marché Bayaka (au croisement des avenues Asosa et Kasa-Vubu, dans le bourg de Ngiri-Ngiri) ou du Marché Somba Zigida, les vendeuses des rues-marchés de Kintambo (juste avant la place Commerciale), les vendeuses de tombola bwaka (chaussures, sacs, vêtements, soutifs et petites culottes...), les petites vendeuses de tas de tomates et de pili-pili sur les trottoirs, les vendeuses de beignets sur la route de Mapela, de Mokali, de Nzoko ou de Siforco, les menuisiers, les charpentiers, les fabriquants de meubles, les matelassiers, les ferronniers, les briquetiers, les maçons, les carreleurs, les ouvriers boulangers, les tenancières de ngandas ou de malewas, les serveuses, les Rideaux ya ndako, les Sœurs en Christ, les Bureaux, les Ivecos, les Ya Mado à la croupe plantureuse et rebondissante, les Katula Kiadi, les Fioti-fioti et les Petites Kadogo qui surmontent leur dégoût et abordent les grosses bedaines friquées avec un « courage ya Bana Boudin », les « Petites 207 » qui doivent remettre un « versement » en fin de journée à des parents-maquereaux, les tenanciers de cybercafés, les vendeurs de téléphones de la place des Artistes, les ligablistes, les bongolateurs et les vendeurs de cartes de téléphone, les chefs de quartier, les agents du service de l'hygiène ou de la population, les infirmières, les secrétaires, les agents de la Snel et de la Regideso, les « roulages », les mbilas, les ngandos, les pasteurs sans paroisse, les écrivains désargentés, les sculpteurs sans commandes, les peintres fauchés et les musiciens qui ne peuvent plus se produire dans différents pays d'Europe et d'Amérique à cause d'une fatwa des Bana-Luabongo, les fonctionnaires mal payés depuis toujours et/ou impayés depuis quelques mois ou quelques années, les basketteuses et les footballeurs de terrains vagues, les pomba, catcheurs et  boxeuses, les plombiers, les mécaniciens, les électriciens, les dépanneurs en informatique, les réparateurs d'appareils photographiques et de téléviseurs, les « frigoristes » (réparateurs de frigos et de climatiseurs), les cuisiniers, les lavandiers, les nounous, les jardiniers, les sentinelles, les chauffeurs particuliers, les pompistes, les taximen, les Wewa sans casques et aux t-shirts poussiéreux, les conducteurs et les chargeurs de taxibus, les portefaix des  minoteries, des chambres froides et des dépôts de ciment, les « poussateurs » ou tireurs de pousse-pousse  ou de chariots (transportant les marchandises débarquées au port, ramassant les ordures, etc), les tolékistes, pédaleurs et tshukudeurs, les femmes agricultrices et les femmes maraîchères, les coupeurs de noix de palme, les chefs de plantations A2 et A3,  les orpailleurs et dragueurs de la rivière Ulindi, les mineurs-bagnards et les forçats-casseurs de pierres, les cireurs de chaussures, les  Bana Mayi et les shayeurs… Mouchoirs ! Maki ! Mai a pio ! Lunettes! Ceintures !, les vendeurs  de noix de cola, d’œufs durs et d’aspirines à la sortie des bars, les vendeurs de cigarettes... Spéciales ou ordinaires?, à la tige, de boulettes de "nwa" (alias diamba), de mesures de Zododo ou de Supu na Tolo, les Bana Petrole, les quados et les réparateurs de vélos, les Katakata installés à la sortie des chambres froides et qui découpent ou dépècent à la machette les poulets, la viande ou les poissons surgelés (gagnant cent ou deux cent francs Luabongais pour un poulet subdivisé en six, huit ou dix morceaux), les fabricants de faux (et de vrais) cachets et d’enseignes (et de visas), les fournisseurs, vendeurs et clients des marchés « Koweit », les Ngembos, les Shégués... Pesa makemba, Excellence ! Pesa lar, Mokonzi ! Nzala ko, Mère-Chef !, et les kuluna, les chômeurs sans diplôme et des diplômés chômeurs, les flexibles, les intermittents, les exclus et les éjectés de l'économie de Marché...

Y a-t-il une place pour tous ces gens-là et laquelle  ?





Ndlr : Vous êtes perdu(e)s ?
Et vous vous demandez où trouver un plan de la ville, un menu de la semaine ou une table des matières quelconque… et comment avoir accès à chacune des différentes séries de séquences du buku « sorciers, services et crapuleux » ?
Problème ezali te, cliquez sur : http://sosecra.blogspot.be/







Aucun commentaire:

Enregistrer un commentaire